Traitements analgésiques pharmacologiques
L’évaluation systématique et régulière des effets des analgésiques et l’utilisation d’un protocole médicamenteux multimodal permettent de diminuer les effets secondaires de l’un ou l’autre des analgésiques. Une administration régulière d’analgésiques permet d’éviter les variations du niveau d’analgésie et de sédation ainsi que de minimiser les risques de dépression respiratoire.
Analgésiques morphiniques
Les voies d’administration les plus fréquemment utilisées sont la voie intraveineuse, sous-cutanée et la voie orale. L’opiacé le plus utilisé en phase postopératoire de chirurgie cardiaque est la morphine.
Dans la pratique, il y a toujoursce souci de maintenir un équilibre entre les risques associés à une prolongation de la sédation en postopératoire enaggravant les risques de causer une dépression respiratoire chez le patient et, en contrepartie, l’objectif de procurer le meilleur soulagement possible de la douleur. L’analgésie contrôlée par le patient (ACP) permet d’obtenir une excellente qualité d’analgésie, encore faut-il que le patient soit suffisamment alerte pour effectuer l’auto-administration.
C’est pourquoi l’administration intraveineuse de morphine est souvent réalisée par l’infirmière en post-chirurgie cardiaque. La transition de l’analgésie intraveineuse à lavoie sous-cutanée ou orale est initiée dès que possible.
Les formes d’analgésiques à libération prolongée pour la morphine et l’oxycodone sont également utilisées dans un contexte postopératoire de chirurgie cardiaque. L’administration de morphine, associée ou non à des anesthésiques locaux par voie neuraxiale, permet d’obtenir une excellente analgésie postopératoire après sternotomie, malheureusement, le risque d’hématome péridural (estimé à 1 sur 3500) en limite l’usage chez les patients anticoagulés. Ainsi, de nombreux anesthésistes évitent cette approche en chirurgie cardiaque. Cependant, dans certaines situations l’analgésie péridurale thoracique présente suffisamment d’avantages pour être utilisée. Récemment, une étude réalisée auprès de 135 patients ayant subi un remplacement valvulaire aortique par voie trans-apicalea comparé une analgésie péridurale thoracique (n = 74) à l’analgésie traditionnelle (n = 61). Les résultats ont montré que la péridurale thoracique procurait un meilleur soulagement de la douleur (p < 0,001), une diminution des complications pulmonaires ( réintubation, pneumonie, trachéotomie ; p <0,05) et de la mortalité à 30 jours et à un an( p < 0,005 ). Les résultats de cette étude démontrent que les bénéfices de la péridurale thoracique sont quelquefois supérieurs aux risques. Ainsi, dans une population très sélectionnée, âgée et présentant des atteintes multisystémiques, et par conséquent fortement à risque de complications multiples, le choix d’une péridurale thoracique pourrait s’avérer avantageux.
Analgésiques non opiacés
Le paracétamol n’a aucun effet sur la coagulation et permet une réduction de 20 % des besoins en opiacés[2,6]. L’utilisation régulière et systématique est essentielle afin d’obtenir un soulagement optimal de la douleur.
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) permettent de réduire l’utilisation des opiacés de 20 à 40 % mais il n’est pas démontré que leur usage diminue les risques de mortalité/morbidité.
Leurs effets secondaires en limitent l’usage en chirurgie cardiaque notamment en raison du risque d’insuffisance rénale et de saignement post-opératoires. L’utilisation des AINS nécessite toujours l’appréciation des risques et des contre-indications. Les inhibiteurs sélectifs de la cyclo-oxygénase (COX-II), comme le valdecoxib, sont associés à une surmortalité par accident vasculaire thrombotique (coronaire et cérébral) après chirurgie pour pontage aorto-coronarien et ne sont pas recommandés dans cette indication.