Évaluation de la douleur
L’évaluation de la douleur ressentie par le patient est à la base du soulagement optimal de la douleur postopératoire en chirurgie cardiaque comme ailleurs. Pour bien évaluer la douleur, il faut obtenir des données essentielles auprès du patient : les signes vitaux, l’intensité de la douleur perçue et les symptômes associés à la douleur. Une évaluation régulière de la douleur à l’aide d’échelles validées doit être effectuée par le personnel infirmier ayant en charge le patient opéré, plus fréquemment encore s’il est constaté une augmentation de 50 % des doses d’analgésiques ou suite à un changement du traitement analgésique. Une évaluation toutes le 2 heures est recommandée dans la gestion de la douleur, de l’agitation et du delirium chez les patient sen soins intensifs par l’American College of Critical Care Medicine (ACCM).
Les signes vitaux :
Une étude réalisée auprès de 105 patients adultes à la suite d’une intervention de chirurgie cardiaque a mis en relation la fluctuation des signes vitaux et l’intensité de la douleur rapportée par les patients à l’aide de deux échelles différentes : une échelle visuelle analogue et le thermomètre d’intensité de la douleur (cf. infra). Cette étude a démontré que le seul paramètre qui évoluait selon l’intensité de la douleur perçue par le patient était la fréquence respiratoire, que le patient soit ventilé mécaniquement ou non. L’évaluation des signes vitaux pour apprécier l’intensité de la douleur est donc un outil imprécis. Les signes vitaux ne sont pas recommandés par l’ACCM comme outil principal d’évaluation de la douleur.
L’intensité de la douleur
Différentes échelles d’évaluation de la douleur ont été développées auprès des patients en phase critique pour évaluer la douleur et certaines sont plus applicables que d’autres en postopératoire de chirurgie cardiaque. Nous avons retenu deux échelles, l’échelle comportementale de la douleur en soins critiques, recommandée par l’ACCM, et le thermomètre d’intensité de la douleur.
L’échelle comportementale de la douleur en soins critiques
L’échelle comportementale de la douleur en soins critiques(CPOT), développée et validée en 2004 par Céline Gélinas, est une échelle reconnue par l’ACCM comme étant un outil de choix pour quantifier l’intensité de la douleur chez les patients en phase postopératoire lorsque ceux-ci sont incapables de rapporter leur niveau de douleur.
Cet outil permet de quantifier le comportement du patient en évaluant le niveau de douleur sur une échelle de 0 à 8, que le patient soit intubé ou non.
Cette échelle inclut 4 comportements quantifiés de 0 à 2 , soit :
– l’expression faciale (Fig. 2) ;
– les mouvements corporels ;
– la compliance avec le respirateur chez le patient intubé ou la verbalisation chez le patient non intubé ;
– la tension musculaire.

L’échelle CPOT peut se révéler utile pour l’évaluation ou la réévaluation du niveau de douleur chez les patients ne pouvant s’exprimer verbalement et ainsi servir de guide pour l’administration des antalgiques.
Cette échelle a déjà été évaluée dans au moins 5 études et a révélé de bonnes qualités psychométriques pour la détection de la douleur chez les patients en soins intensifs.
Thermomètre d’intensité de la douleur
Cet outil a été validé récemment pour l’évaluation des patients adultes en soins intensifs , mais n’est pas encore recommandée par l’ACCM. L’outil consiste en un thermomètre gradué de 0 à 10 avec 6 visages (Fig. 3) qui ont été tracés suite aux résultats des travaux de Prachin en 1996. Ces visages représentent la douleur en illustrant le reflet de la douleur perçue au niveau des yeux, du front, des plis naso-labiaux et de la bouche. Outre les chiffres pairs qui sont associés aux visages du thermomètre (0, 2, 4, 6, 8 et10), les chiffres impairs indiqués sur le thermomètre permettent au patient de situer l’intensité entre deux visages, s’il y a lieu.