Introduction
L’une des définitions de la douleur les plus citées dans la littérature médicale est celle de l’Association internationale pour l’étude de la douleur (IASP) : « Expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite en ces termes. » La douleur est une expérience subjective qui interfère autant avec le psychique et le social qu’avec les fonctions physiques. Il faut prendre en compte à la fois la durée et le caractère approprié ou non de la douleur : la douleur chronique est une douleur qui persiste au-delà du délai habituel de cicatrisation (habituellement 3 mois). Alors qu’une douleur aiguë est généralement la réponse adaptée à sa cause (par exemple, la cicatrisation après une blessure), la douleur chronique n’a pas ce caractère, elle agit directement sur celui qui ensouffre (d’emblée et/ou secondairement), mais aussi sur son entourage familial et social, y compris de travail (environnement et conditions) : tous ces éléments doivent être prisen compte au moment de la prise en charge.
Quel que soit son mécanisme initiateur, somatique, neurologique ou psychologique, la douleur proprement dite est un phénomène complexe dont la perception fait intervenir quatre composantes interactives : sensori-discriminative, affective et émotionnelle, cognitive et comportementale.
L’ensemble de ces dimensions est lui-même sous l’influence de facteurs environnementaux, professionnels, familiaux, sociaux et culturels passés ou présents. De nombreux systèmes participent au phénomène de la douleur : sensoriel (localisation, nature, durée…),moteur (déroulement des mouvements, posture antalgique, raccourcissement musculaire, asymétrie, atrophie…), autonome (symptômes concomitants : transpiration, tachypnée, insomnie…), affectif (humeur, dépression, dégradation de l’image de soi, idées suicidaires, modification de la tolérance à la frustration…), cognitif (expériences antérieures, longs séjours à l’hôpital, consultations médicales répétées, attente vis-à-vis des traitements…). L’analyse des mécanismes physiopathologiques permet de distinguer plusieurs types de douleurs.
Les douleurs par excès de nociception, d’allure mécanique ou inflammatoire, correspondent à l’activation du système de transmission par stimulation excessive des récepteurs périphériques mis en jeu par des processus lésionnels (destruction tissulaire), inflammatoires, ischémiques (entraînant des perturbations métaboliques locorégionales), ou par des stimulations mécaniques importantes (fracture, distension viscérale ou étirement musculo-ligamentaire).
Les douleurs neuropathiques sont celles quis ont associées à une lésion ou une maladie affectant le système somato-sensoriel.
Elles peuvent être spontanées ou provoquées et associer la survenue d’accès paroxystiques (décharges électriques) à un fond douloureux permanent (sensations de brûlures).
Des troubles sensitifs peuvent être associés. Elles ont un retentissement important (fatigue, anxiété, dépression) à l’origine d’une altération de la qualité de vie.
Cette distinction clinique est fondamentale, car le traitement des douleurs par excès de nociception fait appel aux antalgiques définis en trois niveaux par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les douleurs neuropathiques aux antidépresseurs tricycliques, aux antiépileptiques et aux thérapeutiques non pharmacologiques (neuro-stimulationtranscutanée, hypnose, relaxation, techniques cognitivo-comportementales…), voire aux interventions de stimulation médullaire ou corticale. Des recommandations ont été élaborées dans ce sens par la SFEETD afin d’améliorer la qualité de prise en charge de la douleur en ambulatoire.
Selon la Direction générale de la santé (DGS), circulaire DGS/DH no98-47 du 4 février 1998, lors du1er plan gouvernemental de lutte contre la douleurque nous avons conduit (élaboration, réalisation et mise en place), la douleur chronique se répartit entre les pathologies rhumatologiques (lombalgies, lombo-sciatalgies chroniques, fibromyalgies, algodystrophies…), abdomino-pelviennes,
cancéreuses, liées au sida et neurologiques ou neuropathiques: diabétique, post-zostérienne, AVC, SEP, traumatismes médullaires, post-amputation (douleurs demembres ou d’organes fantômes), suites d’intervention chirurgicale ou de traumatisme, douleurs cranio-faciales,migraines, céphalées de tension, algies vasculaires de la face, névralgies faciales…(Tableau 1).
