Manifestations oligo-/polyarticulaires avec tuméfaction articulaire
Genèse infectieuse :
En cas de douleurs polyarticulaires avec tuméfactions synoviales palpables, une infection bactérienne est bien moins probable. Par contre, les infections virales peuvent typiquement se présenter de manière polyarticulaire . Les polyarthrites en cas d’infection virale ne durent dans la grande majorité des cas que quelques semaines. Les hépatites B et C ainsi que les infections à parvovirus B19 sont relativement fréquemment associées aux arthrites . Alors que chez les enfants infectés par le parvovirus B19, les arthrites sont rares (env. 3% des cas), des tuméfactions articulaires sont présentes chez l’adulte dans jusqu’à 60% des cas, une présentation polyarticulaire avec atteinte des petites articulations de la main étant typique. Pour la plupart des infections à parvovirus B19 chez l’adulte, une régression des symptômes articulaires se produit en l’espace de 2 à 3 semaines. Des polyarthrites peuvent également survenir en cas de rubéole. Lors des retours de voyages dans des pays tropicaux, on observe de plus en plus de cas d’infections à alphavirus, en particulier de chikungunya, qui dans la plupart des cas s’accompagnent d’une arthrite. Les symptômes articulaires associés au chikungunya peuvent persister plusieurs mois. Chez les patients ayant une anamnèse de voyage compatible et présentant une arthrite, un examen ciblé est donc nécessaire afin de faire la distinction avec une maladie rhumatismale inflammatoire.
Arthrose active :
Sont à distinguer des arthropathies inflammatoires les cas d’«arthrose active», qui sur le plan clinique peuvent se présenter comme des arthrites et sont la plupart du temps mono articulaires. La mise en évidence de l’arthrose à la radiographie peut donner des indications sur la cause des troubles, mais en cas d’épanchement manifeste, une ponction articulaire avec analyse synoviale doit néanmoins être réalisée. En cas d’arthrose, il faut s’attendre à un épanchement articulaire réactionnel avec un nombre de cellules inférieur à 2000/μl dans la ponction synoviale.
Pose du diagnostic :
En phase initiale, la pose du diagnostic d’une maladie rhumatismale inflammatoire systémique représente un défi et le diagnostic de certitude peut souvent uniquement être posé au cours de l’évolution de la maladie. Alors que, dans le cas typique, la mise en évidence d’auto-anticorps facilite par exemple le diagnostic d’une arthrite rhumatoïde ou d’une collagénose, les cas d’arthrites séronégatives sont souvent difficiles à classer d’un point de vue diagnostique. Les critères de classification peuvent certes constituer une aide, mais c’est le tableau clinique qui est décisif en définitive. Une atteinte articulaire symétrique touchant les petites articulations des mains et des pieds est typique d’une arthrite rhumatoïde. Une répartition asymétrique et l’atteinte de toutes les articulations le long d’un doigt ou d’un orteil indiquent une arthrite psoriasique. La pose la plus précoce possible du diagnostic d’une arthrite chronique est capitale. Différentes études ont montré que l’initiation précoce d’un traitement de fond en cas d’arthrite rhumatoïde, mais aussi d’autres formes de polyarthrites, est associée à une amélioration du pronostic à long terme. En cas de suspicion, il est recommandé de faire réaliser rapidement un bilan par un médecin spécialiste afin de poser l’indication d’un traitement de fond immunomodulateur/-suppresseur.
Arthralgies sans tuméfaction articulaire :
Si l’examen clinique ne met en évidence aucune tuméfaction synoviale, le diagnostic différentiel de l’arthralgie est vaste. En cas de troubles étendus incluant les parties molles et en l’absence d’élévation des para- mètres inflammatoires sériques, il faut envisager un syndrome fibromyalgique. Les douleurs localisées dans le cadre de bursites ou de ténosynovites peuvent survenir aussi bien en cas de maladie rhumatismale inflammatoire qu’en cas de stress mécanique. Les arthralgies sans tuméfaction articulaire sont également possibles pour un certain nombre d’infections virales. En plus des infections virales mentionnées précédemment, le virus d’Epstein-Barr, le cytomégalovirus, le virus herpès simplex et d’autres encore sont à envisager. Les arthralgies sont également possibles en cas de troubles endocriniens, en particulier en cas d’hypothyroïdie. Chez les patients jeunes souffrant de troubles polyarticulaires à caractère mécanique, un syndrome d’hypermobilité articulaire peut en être la cause. Avec l’âge, les arthroses sont plus fréquentes, d’une part sous forme de polyarthroses des mains et d’autre part sous forme d’arthrose des grandes articulations, en particulier des articulations du genou et de la hanche. Les troubles du métabolisme osseux sont des causes plus rares d’arthralgies. Il convient par ailleurs de ne pas oublier que les arthralgies peuvent également survenir en tant qu’effet indésirable de certainsmédicaments.